Haute-Garonne : “Il y avait une vraie volonté de déstabilisation”, Corinne Vignon revient sur son année à l’hémicycle


Corinne Vignon, députée Renaissance de la 3e circonscription de Haute-Garonne, a été réélue en 2022, après son premier mandat débuté 2017. Pour L’Opinion Indépendante, elle revient sur la première année de sa seconde mandature.

Que retenez-vous de cette première année de mandature à l’hémicycle ?

Lors de ma dernière mandature, mon parti politique était largement majoritaire. Cette année, à l’Assemblée nationale, j’ai ressenti une opposition inhabituelle avec une vraie volonté de déstabiliser l’institution. Elle s’est manifestée par des actes forts, des paroles fortes, et même à travers les tenues vestimentaires des députés.

C’était une manière, pour l’opposition, de montrer que les institutions ne sont plus à la page et qu’il est nécessaire de passer à la 6e république. D’ailleurs, il n’y a jamais eu autant de sanctions à l’Assemblée que cette année. Il est vrai que c’était assez remuant au départ. En parallèle, la mobilisation était néanmoins forte. Nous avons tout de même réussi à voter plusieurs textes, dont une grande partie à l’unanimité.

Et au niveau de la circonscription ?

Étrangement, durant cette première année de second mandat, j’ai recensé moins d’appels naturels. Durant la période précédente, avec le Covid-19, nous étions souvent sollicités par les entreprises, les commerçants, les associations et les citoyens. Cette année, c’est totalement différent. Cela m’étonne au vu de la situation actuelle, notamment avec l’inflation.

Comment expliquez-vous cela ?

Est-ce que les citoyens n’ont plus confiance en la vie politique ? Où sont-ils plus recentrés sur eux-mêmes ? Il est difficile d’avoir une réponse claire. Ils s’interrogent peut-être sur notre capacité à pouvoir aider. Ceci dit, je suis surprise, car dans mon cas, je suis reconnue pour faire du terrain en permanence. Les habitants de ma circonscription savent que notre aide peut être utile.

Quel est le moment qui vous a le plus marqué cette année ?

Un épisode m’a particulièrement marqué. Lorsque l’opposition de gauche s’est mise à brandir des pancartes, à scander dans l’hémicycle, “Macron, on est là, même si tu ne le veux pas, on est là” et à chanter la Marseillaise. Puis, les députés du Rassemblement national se sont également mis à chanter l’hymne national. J’étais clairement hallucinée. Nous n’avions jamais vu ça. Les invectives ont été brutales.

Un autre moment m’a étonné dans un autre registre. Les débats sur la loi de programmation militaire, dont j’ai participé à l’élaboration, se sont déroulés dans un calme olympien alors qu’une somme de 413 milliards était en jeu. Les députés de la NUPES ont d’ailleurs félicité le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, pour sa clarté et sa rondeur. On lui a dit, “si tous les ministres étaient comme vous, tout irait mieux”. En un an, nous avons donc vécu les deux extrêmes, la folie et le calme.

Vous avez évoqué le nombre de sanctions qui n’a jamais été aussi important à l’Assemblée. Selon vous, sont-elles justifiées ?

Yael Braun-Pivet est une personne qui laisse la parole aux gens. Il y a des limites à ne pas dépasser. Il se trouve qu’en tant que député, nous devons donner l’exemple dans notre comportement, dans notre façon d’invectiver et quelques fois, les paroles ont été trop violentes. Il est question de débattre de sujets et non pas d’agresser une personne verbalement. Les sanctions, décidées aussi par le Bureau, m’ont paru justifiées. D’ailleurs, grâce à celles-ci, la fin de cette première année a été plus calme.

Durant cette première année, vous avez défendu la “remise à niveau” permise par la loi de programmation militaire. Quelle a été votre rôle dans l’élaboration de cette loi ? 

J’ai été présidente de la condition des hommes et des femmes militaires. Nous avons dédié 413 milliards d’euros sur la condition des militaires mais aussi de leurs époux. Par exemple, si vous êtes officier, tous les trois ans vous serez muté. Votre conjoint va devoir également changer de lieu de travail avec vous. Ce sont des mutations forcées. Bien souvent, les femmes militaires doivent se débrouiller toute seule pour tout.

Il faut qu’elles trouvent un logement, une école pour les enfants, un nouveau médecin, une nouvelle profession, etc. Il se trouve que les femmes militaires ont moins de chance de se faire embaucher en raison de leur mobilité forcée. Elles se retrouvent donc souvent sans aide. À travers cette loi, nous mettons en place des aides avec le Medef pour qu’elles accèdent à l’emploi. Nous incitons aussi à ce que l’armée s’ouvre aux élus. C’est notre devoir de les aider. 

Cette année, vous avez également mené plusieurs combats sur le thème de la condition animale à l’Assemblée nationale. Quel est le calendrier à venir pour cette thématique ? Des discussions à l’hémicycle sont-elles prévues ?

Concernant la proposition de loi sur les colliers étrangleurs et les colliers électriques, elle doit être présentée au Sénat. Pour cela, nous attendons que les élections sénatoriales se passent le 24 septembre 2023. Nous souhaiterions par la suite que cette proposition soit reprise par le groupe LR au travers d’Arnaud Bazin, sénateur et lui-même très proche de la cause animale en étant vétérinaire, soit reprise par le groupe Renaissance ou Écologiste, avant d’être étudiée par le Sénat.

Qu’en est-il de votre combat contre la hausse du nombre d’abandons d’animaux ?

En termes d’abandons, il faut que l’on renforce ce que l’on a fait dans la loi en octobre 2021. Je souhaite vivement qu’il y ait un permis de détention de l’animal, car aujourd’hui si on demande à un Français combien coûte un chien, il est souvent bien loin du compte. Il faut que les gens, aient conscience de la responsabilité financière avant l’adoption. 

Nous devons discuter de cela avec le groupe parlementaire. Le permis de détention serait accessible à tous, cependant, en cas d’abandon ou si l’animal n’est pas identifié, ce permis vous est retiré. Par ailleurs, il faudrait que les associations de protection animale puissent aller dans les écoles pour sensibiliser les citoyens dès le plus jeune âge. 

Quels sont vos autres dossiers pour la rentrée ?

Je suis en train de préparer pour la loi de finances (PLF), une augmentation des budgets de la recherche sur les organoïdes. Qu’est-ce que c’est ? Cela consiste à vous prendre, si vous êtes malade, un tout petit bout de peau et de muscle. Ainsi, au lieu de faire une expérimentation sur les animaux, les chercheurs vont étudier les caractéristiques de cette maladie sur ces prélèvements. C’est l’avenir de la médecine.

À l’échelle européenne et toujours en matière de bien-être animal, nous allons nous pencher sur la question des transports des animaux, des cages et sur la réglementation des abattoirs. Ce sont des éléments très importants que nous allons intégrer petit à petit dans nos lois. Je réunis à la rentrée le groupe sur le bien-être animal qui est composé de 62 personnes (NUPES, RN, Modem, Renaissance).

Et quels axes de travail en termes de mesures sociales ?

Au début de ce second mandat, j’ai pas mal travaillé sur la loi anti-squatteur qui donnait plus de droit aux propriétaires. J’ai aussi étudié le sujet des pratiques commerciales de la grande distribution vis-à-vis des agriculteurs où il y a énormément d’abus. Le sujet de la rénovation énergétique des bâtiments publics est aussi au cœur de mes engagements.

Pour l’heure, le dossier le plus important de cette rentrée concerne le projet de loi de finances, notamment sur la partie recherche et sécurité sociale. Nous devons continuer nos efforts vis-à-vis des soignants. Autre point primordial, le Grand âge. Nous n’avons pas encore de loi grand âge et il est nécessaire d’en voter une rapidement. Elle viserait à anticiper l’impact dû à l’augmentation des personnes âgées en situation de dépendance.

De plus, un thème, qui est un grand enjeu sociétal, doit être étudié : la fin de vie. Je suis pour l’assistance au décès. Nous choisissons notre vie, nous devrions donc avoir le droit de choisir notre mort, si et seulement si, nous sommes en phase finale. Enfin, la loi immigration sera également débattue. Tous ces dossiers, que je défends vivement, feront l’objet de discussions à l’hémicycle et constitueront les grands chantiers de ce trimestre.


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